You won't get much closer
Until you sacrifice it all
You won't get to taste it
With your face against the wall
Ooh, 1, 2, 3, 4 fire's in your eyes
And this chaos, it defies imagination
Ooh, 5, 6, 7, 8 minus 9 lives
And I know that you will fight for the duration
Ooh, 1, 2, 3, 4 fire's in your eyes
And you know I'm not resisting your temptations
Ooh, 5, 6, 7, 8 minus 9 lives

You've arrived at panic station !

[Song: Panic Station – Artist: Muse]

Commençons par sa conception. Il a été conçu en Irlande (Eire), pays où il est pour ainsi dire très difficile d’obtenir la permission d’avorter, si vous voyez ce que je veux dire. Or, Amber Bridge, membre d’un genre d’aristocratie moderne encore très attachée aux traditions, n’a pas eu que de la chance dans sa vie. Elle insista pour avoir ce que les vulgaires roturiers de bas étage appelaient « un enterrement de vie de jeune fille », mais celui-ci tourna très mal et elle se retrouva enceinte. Elle ne l’annonça qu’à son fiancé et ce, 5 mois plus tard seulement, lorsqu’il lui fut impossible de cacher sa grossesse. C’était la panique. Impossible d’avorter et les parents du dit fiancé n’accepteraient jamais de marier leur fils avec une fille déjà en cloque à cause d’un autre. Son fiancé était chinois et musicien à ses heures. BREF. Il fallait se débarrasser du gamin à venir. Après de longues recherches à l’abri des parents, ils trouvèrent l’endroit idéal : Une petite ville au milieu du Pacifique, que l’on pourrait louper facilement : Amissia. La criminalité était déjà très haute à l’époque, l’espérance de vie du gamin serait donc… courte, selon leurs pronostics. Elle irait là-haut et abandonnerait l’enfant. C’était le plan. Mais tout ne se passe pas toujours comme prévu…

Je murmure dans tes entrailles
Je n’entends plus le gong
Plus je chine moins je te trouve
Tu te déracines
J’ai oublié ton nom Plus d’identité
Mais où sont tes racines ?

[Song : Machine – Artist : -M-]


Elle arriva sur Amissia en temps et en heure. Elle était à huit mois. Elle se mit en relation avec un médecin à qui elle parla de son problème et qui comprit qu’elle devait rester discrète, et lui aussi. Elle mena sa grossesse à son terme… à 2 semaines près. Le petit naquit le 1er février. Par soucis d’humanité, si l’on peut dire, elle s’occupa de l’enfant pendant 3 mois avant de l’abandonner à son sort. En réalité, il y a plus de chances pour que cette décision soit due aux horaires des bateaux. Sa mère ne lui avait pas donné de nom. Donner un nom, c’est s’attacher. C’est le médecin qui décida pour elle, en le déposant à l’orphelinat. La mère ? Engloutie par l’océan.

A is for Amber who drowned in the pool…

[Song: A Gorey Demise – Artist: Creature Feature]

Le navire fit naufrage… Le père? Le vrai ne fut jamais au courant de rien. Le fiancé ? Il n’était même pas attristé et par un « heureux hasard », périt dans un incendie lors d’une visite au musée. Il ne restait donc aucune preuve de l’existence des parents de l’enfant. Le médecin était très attaché à la religion et aux Ecritures, et insista auprès de l’orphelinat pour que le petit ait des cours de religion.

Avec tout ça, je ne vous ai toujours pas donné le nom du garçon. En se présentant aux portes de l’orphelinat, le médecin, bébé au bras, demanda à ce que l’on accepte le petit car sa mère n’en voulait pas et que lui ne pouvait pas s’en occuper tous les jours.

- Comment s’appelle-t-il ?

- Caïn. Il s’appelle Caïn, lui dont les parents furent dégoutés par son existence même.

Lacrymósa dies illa,
qua resúrget ex favílla
judicándus homo reus.
Huic ergo parce, Deus.
Pie Jesu Dómine,
dona eis réquiem. Amen.

[Song: « Lacrimosa » (18ème strophe du Dies Irae)]

On dit souvent qu’être élevé à l’orphelinat est une expérience spéciale. Cela n’a jamais été aussi vrai, surtout pour Caïn. En effet, on remarqua assez vite que le petit était plus intelligent que certains autres enfants (pour ne pas dire tous) et sa tendance à l’isolement conduisit les gens à penser que Caïn pouvait être autiste. Mais on écarta très vite cette hypothèse, l’enfant ne présentant pas certaines caractéristiques mais toutes les caractéristiques des enfants ayant des difficultés à s’insérer du fait de leur précocité. Il commença son enseignement religieux vers 5 ans ; il retenait vite et bien, mais commença déjà  à montrer davantage d’aptitudes pour ce qui était de la musique en prêtant davantage attention à l’aspect chanté. Bien que cela ne fût pas non plus sa passion première, le chant grégorien, les cantiques, la messe, etc. furent ses premiers moyens de prendre contact avec la musique. Malgré cela, il n’aimait pas montrer sa supériorité, faisant parfois exprès d’avoir des résultats moyens. Et l’orphelinat n’ayant pas les accessoires ou les fonds pour cela, il garda un lien lointain avec la musique. Ce n’est qu’en rencontrant un père de l’église d’Amissia qu’il put se rendre compte du coup de foudre qu’il avait eu pour cet art. C’est en touchant pour la première fois les touches de l’orgue à l’âge de 5 ans (ses pieds ne touchaient pas les pédales) que Caïn comprit intimement que la musique serait plus qu’un passe-temps. Toutefois, il s’ennuie pendant la messe. Ecouter les chants ne le dérange pas, mais – et c’est bien de son âge – ses mains le démangent, il a besoin de bouger, d’agir. Il s’isole alors dans la musique, et demande fréquemment à aller à l’église pour travailler ses doigts, chose que seul un prêtre lui autorisait, les autres étaient plus réactionnaires, voire s’acharnaient sur lui à cause de sa couleur de cheveux. Les autres lui parlent rarement, préférant ne pas approcher un être dont ils ne connaissent rien. Les responsables de l’orphelinat restaient relativement impartiaux, presque indifférents. Caïn n’est pas un enfant comme les autres, certes, mais on ne peut pas lui faire de traitement de faveur… Mais très tôt, lors d’une sortie à la fête foraine organisée par l’orphelinat, on découvre que Caïn souffre de photosensibilité, diagnostiquée par son médecin traitant qui se trouve être… celui qui l’a amené à l’orphelinat. Oui, il a insisté pour être le médecin du petit, probablement pour se disculper (et parce qu’il sait que sa mère n’est pas dans l’état de changer d’avis). BREF. Il lui donna une paire de lunette de ski, lui expliquant qu’il serait à jamais obligé de porter quelque chose qui altère la lumière, sous peine de convulser.

Malgré tout, il grandit, malgré son enfance isolée du reste du monde… Jusqu’à ce qu’il arrive, lui.

- Coucou, tu t’appelles comment ?

- Je suis en train de jouer de l’orgue…

- Oh, désolé. Je trouvais juste que tu jouais bien, alors je voulais savoir qui tu étais…

En se retournant après avoir arrêté de jouer, il le vit. Un petit garçon qui devait avoir à peu près son âge, c’est-à-dire 8 ans, à l’époque. En fait, Caïn hésita en le voyant pour la première fois, ne sachant pas trop s’il s’agissait d’un garçon ou d’une fille. Il avait les cheveux couleur des blés, peut-être légèrement plus claire, le teint de porcelaine, les traits fins et portait un pull marron, un simple jean et de simples chaussures. Mais le plus percutant fut ses yeux. Ces grands yeux d’un bleu si profond que s’y plonger équivalait à se noyer. Accompagné de son sourire, ces deux saphirs lui donnaient un air innocent…

*On dirait un ange…*

Il continuait de le fixer.

- Ben alors, tu as perdu ta langue ? Comment tu t’appelles ?

- Caïn. Je suis Caïn…

- Ah ben ça c’est drôle ! Je m’appelle Abel, enchanté ! ^^

Il lui tendit la main pour serrer la sienne. Caïn sourit, ce qui lui arrive rarement, et la prit.

- On est promis à un terrible destin alors.

- Comme si on pouvait espérer autre chose ici ! J’espère juste que tu ne me tueras pas ! ^^

(Je tiens à préciser qu’Abel est aussi très intelligent pour son âge (même si j’estime qu’un enfant peut avoir un minimum d’esprit critique quand les conditions sont réunies) et que des mots pareils sont sortis de la bouche d’un enfant de 9-10 ans, car Abel est en réalité plus âgé que Caïn. Mais ils semblent avoir le même âge.)

Les deux enfants se mirent à rire, marquant ainsi le début d’une belle amitié… ou en tout cas, elle aurait dû l’être.

Ils furent amenés à se voir tous les jours ou presque, plus ou moins en secret, car sortir de l’orphelinat n’était pas chose aisée, surtout avec le climat de l’extérieur, la criminalité montante, et les risques encourus. En tout cas, Caïn admirait Abel. Celui-ci avait une telle joie de vivre… A croire qu’il était immunisé contre ce qu’il se passait.

Everything about you is how I wanna be
Your freedom comes naturally
Everything about you resonates happiness
Now I won't settle for less

Give me all the peace and joy in your mind

[Song: Bliss – Artist: MUSE]

Ils risquaient tout, même si cela devait leur attirer des ennuis, ils s’en sortaient toujours et riaient bien de leurs bêtises. Si Caïn a eu un semblant d’enfance, c’était bien grâce à Abel. Le plus dur était d’essayer d’expliquer à son médecin d’où venaient les blessures qu’il pouvait avoir sans laisser entendre qu’il n’était plus dans l’orphelinat tout le temps. C’est ainsi que Caïn apprit que le mensonge était non seulement nécessaire, mais aussi une affaire d’entrainement.

Ceci dura jusqu’à sa 12ème année. Pourquoi 12? Parce qu’à cet âge-là, les enfants eurent l’âge de vraiment faire attention à ce qu’il se passait autour d’eux, et aussi parce que ce fut à cet âge-là que Caïn commença à vraiment bouger, ou du moins que sa vie commença à bouger. En effet, du fait de son âge, les responsables étaient moins regardants vis-à-vis des allers et venues de Caïn. Il était plus libre, ce qui lui permettait de voir Abel plus souvent, mais étrangement, celui-ci lui rendait moins rendez-vous chez lui, ils se voyaient de plus en plus à l’extérieur. Malgré tout, Abel resta aux yeux de Caïn un véritable rayon de soleil qui éclairait chacune de ses journées. Et un jour, Caïn se rendit compte qu’Abel était touché par ce qui arrivait à l’île, cette montée de la criminalité ne présageait rien de bon.

- Caïn, j’ai lu des livres là-dessus, et je te le dit, on ne peut pas rester les bras croisés comme ça. On ne peut pas faire comme si cela n’existait pas. Pour l’instant, on a l’impression que tout va bien, mais bientôt, il sera impossible de faire quoi que ce soit. Le gouvernement sera obligé de prendre des mesures radicales. Une criminalité trop haute, ça n’est pas bon.

- Mais comment peux-tu savoir où la situation en est?

- Mais regarde autour de toi! Ecoute les adultes! C’est vrai que parfois, ils croient mieux savoir que tout le reste du monde, mais il peut arriver qu’ils aient raison!

- Alors qu’est-ce que tu suggères? On doit essayer de faire la police à la place de la police?

- Non, ça c’est justement ce que le gouvernement va essayer d’augmenter. Il va forcément augmenter des unités, voire même envoyer des unités qui ne viennent pas d’Amissia ou d’un organisme extérieur, je n’en sais rien. Mais essayer de faire leur boulot seuls, ça n’ira pas… Et puis, s’ils en arrivent là, l’organisme de sécurité risque d’écraser la population, se croirait tout permis, et finalement, la situation empirerait…

Il était impressionnant de voir Abel lorsqu’il réfléchissait. Hormis son intelligence face à la situation qu’il avait déjà totalement compris, il semblait être une autre personne. Lui d’ordinaire léger, qui semblait ne pas se préoccuper des problèmes extérieurs, qui respirait la joie de vivre, il était tout à fait sérieux, ne souriait pas, fronçait les sourcils, était très concentré lorsqu’il essayait de réfléchir. Le changement allait jusqu’à son timbre de voix.

- Mais alors tu comptes faire quoi? Créer ou faire partie d’un groupe qui ne serait ni pour l’un ni pour l’autre? Combattre le crime tout en essayant d’éjecter ceux qui font la police à la place de la police?

- Combattre le crime et le crime qui combat le crime par un crime détourné? Ca serait absurde. Me livrer directement serait plus judicieux…

- De quoi tu veux parler?

- De rien, de rien.

Des conversations de ce genre se répétèrent souvent, et à chaque fois, dès que l’on effleurait l’idée que peut-être l’un d’entre eux, généralement Abel, puisse être coupable de quelque chose malgré leur jeune âge, Abel détournait la conversation et reprenait son attitude désinvolte, même si cela sonnait faux au possible. Et jamais Caïn ne chercha à savoir ce qu’il avait, jusqu’à ce qu’on le tienne au courant de la situation…

Il avait à présent 13 ans. Caïn continuait d’apprendre la musique, mais commença également, sous les conseils avisés de son médecin, d’Abel, et de son professeur (oui parce qu’orphelinat ne veut pas dire « pas d’école »…) la physique et les mathématiques. Il montra certaines prédispositions à ces sciences, ce qui lui permis de se confectionner lui-même des lunettes, ses googles. Il mit longtemps, elles ne furent pas prêtes avant ses 14 ans, mais revenons à nos moutons.  Il voyait toujours Abel régulièrement, mais il semblait préoccupé par quelque chose, et, même s’il essayait de les cacher, Caïn remarquait des blessures et des morsures sur le bras d’Abel. Il lui demanda plusieurs fois ce qu’il lui était arrivé, mais il ne répondait pas. Et un jour, on put lire dans le journal qu’un corps calciné avait été retrouvé dans un coin de forêt. Les pompiers avaient réussi à maîtriser le feu, le coupable avait pris soin de brûler une partie de la forêt qui ne risquait pas de provoquer un incendie plus généralisé. Mais du coup, le corps était presque impossible à identifier, et on renonça bien vite à essayer de savoir qui lui avait fait ça. Un mois plus tard environ, on trouva un autre corps, cette fois baigné dans de l’acide chlorhydrique. Le corps n’était absolument pas identifiable, et il était impossible de voir si les os avaient été sérieusement endommagés (et avec l’odeur de chair dissoute, laissez-moi vous dire qu’ils n’avaient pas l’intention de s’attarder sur une éventuelle cause du décès qui semblait plutôt évidente), mais un élément restait à éclaircir: il manquait un bras au (reste du) cadavre. Il ne fallut que peu de temps à Caïn pour faire le rapprochement avec Abel et il courut pour savoir si tout allait bien. Il trouva Abel, et vit que ses mains semblaient brûlée tantôt par le feu, tantôt par autre chose. Même si Abel soutenait qu’il n’avait rien, Caïn eut des doutes et s’inquiéta pour lui, sachant pertinemment qu’Abel était doué en biologie et en chimie, et que donc, il pouvait tout à fait savoir comme se débarrasser des corps. La seule question était : Pourquoi? Pourquoi lui cachait-il autant de choses ?

Il ne fallut pas beaucoup de temps pour que les choses deviennent claires. La famille d’Abel arriva à l’orphelinat quand Caïn eut 14 ans. Elle venait pour l’adopter… C’est ainsi que Caïn gagna un nom de famille et devint Caïn Sen. C’est en arrivant à la maison (anecdote : les Sen n’avaient pas d’autre pièce que la cave à fournir à Caïn en guise de chambre ; Abel vivait déjà dans le grenier) qu’il comprit tout.

- Maintenant que tu es mon frère, Caïn, tu fais partie de la famille Sen et tu dois porter son fardeau également.

Cette déclaration fit peur à ce pauvre Caïn qui ne savait pas ce qu’on allait lui annoncer. En réalité, le fardeau de la famille Sen avait un nom. Il s’appelait Zack. C’était lui qui avait tué les deux personnes, Abel s’était contenté de faire en sorte qu’on ne puisse jamais deviner qu’il s’agissait de cannibalisme et qu’on retrouve le cannibale. Zack n’était pas (que) cannibale. Disons plutôt qu’il mangeait de tout, mais genre de tout, et qu’il avait une réelle préférence pour la viande, surtout humaine. Il avait toujours montré préférence, mais c’est surtout vers l’âge de 8 ans qu’il commença à devenir un vrai cannibale. Ceci expliquait pourquoi Abel était bizarre à ses 13-14 ans, et donc quand Caïn avait 12 ans. En tout cas, il avait un problème véritable, mais la famille ne pouvait pas se résoudre à le perdre. Pourtant, il était dangereux. La preuve était qu’il ne faisait pas la différence entre sa famille et le reste. Il mangea d’abord son père, qu’Abel, non sans tristesse, fit disparaître le corps en broyant les os qui restaient. Sa mère « disparut » à son tour dans les six mois qui suivirent. Abel, qui avait alors 16 ans, devint le chef de famille. Plusieurs fois, ce fut à Caïn de se débarrasser des corps, Zack devenait de plus en plus ingérable, de même que la situation à Amissia. Abel voyait cela et commençait à réfléchir à comment il pouvait faire quelque chose, et dut s’avouer qu’il ne pouvait pas faire grand-chose. La folie de Zack était contagieuse, ou du moins, elle semblait contagieuse. Elle commençait à gagner les deux garçons, Caïn en le rendant fou, autant dans sa façon d’appréhender le monde que dans sa façon de penser. Il devenait plus expéditif. Et Abel doutait de lui-même. Puisqu’il s’agissait de son frère biologique, il se demandait si lui aussi n’était pas comme ça…

Sanctus Espiritus, redeem us from our solemn hour
Sanctus Espiritus, insanity is all around us
Sanctus Espiritus, is this what we deserve,
can we break free from chains of never-ending agony?

Are they themselves to blame, the misery, the pain?
Didn't we let go, allowed it, let it grow?
If we can't restrain the beast which dwells inside
it will find its way somehow, somewhere in time
Will we remember all of the suffering
Cause if we fail it will be in vain

[Song: Our Solemn Hour – Artist: Within Temptation]

Il fallait avancer. Même si Zack devenait de plus en plus ingérable. Mais il n’y avait pas que de l’agitation. Il y avait aussi des moments de tranquillité. Par exemple, le Noël où Abel offrit à Caïn une guitare. C’était le premier instrument de musique qui appartenait vraiment à Caïn. Jusqu’ici, il n’avait joué que sur des instruments qu’on lui prêtait. Mais en plus, cela venait d’Abel, cette lumière dans sa vie, pour qui il donnerait sa vie… Lorsqu’il reçut le cadeau, il ne put s’empêcher de rougir.

- Ha ! Ha ! Tu es tout rouge!

Ce genre de réaction, ajouté au fait qu’il passait tout son temps avec Abel, sans parler du fait qu’à chaque fois qu’ils en avaient l’occasion, ou qu’un coup de déprime de faisait sentir, ils se faisaient des câlins… (Des CÂLINS j’ai dit ! Rien de plus ! è_é) Vous comprendrez que le monde entier se demande s’il n’y avait pas plus qu’une relation amicalo-fraternelle entre eux…

- Maintenant, il faut que tu lui donne un nom.

- Quoi ? Pourquoi je dois donner un nom à une guitare ?

- Tu dois donner un nom à TA guitare parce que ça l’humanisera. Je ne te vois jamais avec quelqu’un d’autre que moi ou Zack, alors peut-être que si tu lui donnes un nom, tu t’y attacheras. Qui sait, peut-être que tu tomberas amoureux d’elle ! Ha ! Ha !

- Euh… Si tu le dis…

- Mais c’est vrai quoi ! Tu ne tombes jamais amoureux ! è_é

- Ca, j’en suis pas sûr…

- Pardon ?

- Non, rien. ^^ Je… Je ne sais pas quel nom lui donner…

- Oh, tu n’es pas obligé de le faire tout de suite. Tu peux le faire un autre jour.

Ils se retrouvaient parfois à la chapelle (après avoir enfermé Zack dans le placard de la cave, avoir fermé toutes les fenêtres à triple tour et sécurisé le périmètre), seul endroit à peu près calme sur l’île où l’on ne risquait pas vraiment de se faire tuer. La criminalité continuait de monter. Mais contrairement à ce que croyait Abel, Caïn rencontrait des gens, il rencontrait du monde. Dont une fille qui s’appelait Linda. Elle était avec lui à l’orphelinat, et encore à ce moment-là, elle était l’une des seules personnes qui lui parlaient. Caïn aimait bien Linda. Il la voyait parfois en sortant seul, pour une quelconque raison, sans Abel. Un jour, en rentrant, Abel n’était pas vraiment dans son état normal, mais Caïn mit cela sur le compte de la fatigue, car Zack était plutôt agité.

- Où tu étais ?

- Abel… Je suis allé faire quelques courses, on a presque plus rien à manger…

Caïn rangeait les courses, était dos à Abel.

- Au fait, je pense que je sais comment je vais appeler ma guitare… Qu’est-ce que tu en dis si je l’appelle Linda ?

- Linda ? Comme la fille qui passe parfois près de la maison pour voir si tu es là ?

- Euh… Si tu le dis, en tout cas, oui, c’est bien d’elle dont je parle… Elle me donne parfois de bons conseils… Et puis, on se connait depuis très longtemps et…

Il fut interrompu par une sensation de douleur, quelque chose qui s’enfonce dans sa peau. Il crut tout d’abord qu’il s’agissait de Zack, mais en essayant d’attraper la tête de son agresseur, il s’aperçut non sans surprise qu’il était trop grand pour être le petit cannibale. Il tâta la tête pour vérifier qu’il s’agissait bien de ce qu’il pensait. C’était bien Abel qui venait de le mordre dans le cou. Il pleurait, mais Caïn ne fit rien pour l’empêcher d’enfoncer ses dents dans sa chair.

- Tu es à moi… Tu ne peux pas m’abandonner…

Caïn soupira légèrement et le serra dans ses bras avant de lui chuchoter à l’oreille :

- Jamais… Je t’appartiens, je ne te laisserai jamais tomber.

- … Chante-moi une chanson… s’il te plait…

Caïn n’avait pas chanté, ou en tout cas, jamais réellement, depuis son enfance. Mais il tenta quand même, découvrant alors son timbre de voix réel (je précise qu’il venait de finir de muer, sinon, je vous laisse imaginer à quoi aurait ressemblé sa tentative).

- C’est joli… Tu devrais t’entraîner, tu pourrais finir musicien…

- Jamais sans toi…

Malheureusement, ce genre de moments ne peut durer éternellement. Zack redevint ingérable et la criminalité ne cessait d’augmenter.

- Caïn ? Je peux te parler, dehors ?

- Ben , Zack est en train de dormir, alors si on ferme la porte, je pense que oui.

Il l’emmena dans la forêt. Il avait l’air fébrile.

- Caïn… Et si on partait ? Toi et moi ?

- PARDON ?!

- Et si on partait d’Amissia ?

- Mais… Et Zack ?

- Tu sais tout comme moi qu’il est ingérable et qu’on n’arrivera pas à le dompter, il finira par nous bouffer !

- Oui, mais ça reste notre frère !

- Il faut partir tant qu’il en est temps !

- Qu’est-ce que tu veux dire ?

- Tu te souviens, quand je disais que la criminalité montante n’était pas un bien ? Eh bien… Je pense que maintenant, il risque d’être trop tard. Bientôt, on ne pourra plus quitter l’île ! Ca sera manger ou être mangé ! On aura plus de droits !

- Et tu préfères abandonner ton frère biologique pour sauver ta peau ?

- Mais lui, il fait partie de cette société !

- Et alors ? On ne peut pas l’abandonner. Tu le sais tout comme moi.

Il s’approcha de lui et prit son visage dans ses mains pour le rassurer.

- Tu as peur de perdre tes droits ? Alors il faut qu’on se batte pour ça. On doit se battre pour nos droits. Ensemble.

Come ride with me
Through the veins of history
I'll show you how god
Falls asleep on the job
No one's gonna take me alive
The time has come to make things right
You and I must fight for our rights
You and I must fight to survive

[Song: Knights of Cydonia – Artist: MUSE]

Sur ce, Caïn pensa que c’était terminé et reprit sa vie comme si rien n’avait changé. Mais le pire était à venir. Il pensait qu’Abel avait compris. Il pensait que son frère et meilleur ami allait redevenir la joie de vivre incarnée. Mais en réalité, Abel faisait semblant. Et un jour, ce qui devait arriver arriva… Ou pas. Personne n’aurait pu prévoir que cela arriverait. Ou plutôt, personne ne pouvait prévoir que cela prendrait de telles proportions. Toutefois, cela donnait lieu à des réflexions sur la situation de l’île. Les criminels ne pouvaient en aucun cas être soutenus. Ce qu’ils faisaient était clairement préjudiciable. La police ne valait pas mieux… Alors que faire ?

- Caïn… Tu sais que je t’aime, n’est-ce pas ?

- Oui, Abel, tu me le répètes tout le temps. Moi aussi je t’aime.

Et un jour, Abel partit. Lorsque Caïn s’en rendit compte, il était déjà trop tard. Il courut pour le chercher partout, sans oublier de verrouiller toutes les issues pour éviter d’avoir des morts sur les bras, mais lorsqu’il finit par trouver Abel, il était trop tard. Il aperçut au loin une légère fumée. Abel était au milieu des flammes, visiblement inconscient. Caïn se démena pour le sortir, et une fois dehors, se rendit compte qu’Abel était blessé mortellement. Abel le regardait avec un sourire.

- Désolé, j’ai… J’ai pas réussi… Il… Il va falloir que tu te battes pour nos droits tout seul…

- Ne dis pas n’importe quoi ! Je… Je vais te sauver !

- C’est impossible et tu le sais… Mais tu avais raison… On ne peut pas partir d’ici… Amissia et Zack mérite qu’on se batte pour eux… Promets-moi que tu protègeras Zack…

- Ou… Oui, je te le jure.

- Parfait. Maintenant je suis tranquille…

Puis après un petit temps.

- Caïn… Je suis désolé… Que tu aies été mêlé à cela… Tu n’es pas un meurtrier…

Il regarda le ciel.

- Dommage que la fumée obscurcisse le ciel… Il fait si beau aujourd’hui… Caïn… Je… Je t’aime tu sais…

Puis plus rien. Il gisait là, mort. Pendant un instant, Caïn ne put bouger. Lorsque son corps prit conscience qu’il ne s’agissait pas d’une mauvaise hallucination, il lui ferma les yeux. Il fut incapable de pleurer à ce moment-là. Il porta son corps jusqu’à l’église pour demander un enterrement, le plus vite possible. En rentrant à la maison qui était maintenant la sienne et celle de Zack, il s’enferma dans sa chambre et se recroquevilla sur son lit, pour dormir. La journée fut dure. Zack ? Il ne se rendit pas compte que son frère avait disparu, ne faisant pas réellement attention à son entourage de toute façon. Caïn hésita à l’emmener à l’enterrement, puis se ravisa, car Zack était un secret, personne n’était au courant de son existence. Le dit enterrement eut lieu 3 jours plus tard. Il n’y eut pas beaucoup de monde. Et étrangement, Linda fut présente. Elle se posa comme soutien premier à Caïn. En rentrant, il se mit sur son lit, et toutes les larmes qui n’avaient pas coulé ces derniers jours coulèrent d’un coup. Il faillit tout casser, jusqu’à ce que son regard se pose sur sa guitare… La guitare sans nom, le cadeau d’Abel. Il la prit, pinça quelques cordes, puis la serra dans ses bras.

- Abel… Tu t’appelleras Abel…

I've exposed your lies, baby
The underneath is no big surprise
Now it's time for changing
And cleansing everything
To forget your love

My plug in baby
Crucifies my enemies
When I'm tired of giving
My plug in baby
In unbroken virgin realities
Is tired of living

[Song: Plug in Baby – Artist: Muse]

Il emmena Zack dehors, sans laisse, une fois, pour se rendre sur la tombe de son frère, mais pas de la façon que l’on croit. En fait, Caïn, désormais chef de famille, avait toutes les responsabilités qui lui tombaient dessus d’un coup. Au détour d’un chemin arriva Linda. Ils engagèrent la conversation.

- En tout cas, j’espère qu’on saura qui a assassiné ton frère à l’arme blanche.

Cela interpela Caïn. Officiellement, pour le grand public, Abel était mort de suffocation, à cause du feu. Lorsqu’il avait dû expliquer la blessure, il avait simplement dit qu’il se l’était fait en tombant.

- Euh… Linda… Je n’ai jamais mentionné d’arme blanche…

Sachant qu’elle était percée à jour, Linda changea radicalement d’attitude et avoua presque qu’il s’agissait d’elle. Caïn lui donna rendez-vous le soir même dans cette même forêt. Vous vous doutez qu’à ce moment-là, il était plus qu’en colère, il était furieux, hors de lui. Il alla au rendez-vous… Mais avec Zack, et sans laisse. Contrairement à ce que l’on pouvait penser, Zack pouvait se montrer obéissant et n’était pas qu’un animal. Il était doué de réflexion. Et des deux frères, c’était Caïn qui se débrouillait toujours le mieux pour rendre Zack plus docile. Aussi l’avait-il suivi sans esclandre une fois que Caïn lui eut expliqué le plan d’attaque. Linda arriva.

- Je peux savoir pourquoi tu as tué Abel ?

- Parce que c’est un criminel ! C’est un tueur cannibale ! C’est lui, le serial killer qui a tué ces gens et fait disparaître les corps ensuite !

Caïn l’écouta, et soudain, malgré sa rage montante, se mit à éclater de rire. C’était le début de la folie sérieuse.

- Abel n’était pas le tueur… Abel était le nettoyeur. Il avait un secret…

Linda ne comprenait pas, et Caïn bougea pour se placer derrière elle, qui, désormais effrayée, ne bougeait plus, sinon pour trembler.

- Zack ? Tu peux te montrer maintenant…

- … faim… Ca sent… l’essence…

- Probablement l’odeur persistante de celle qu’elle a utilisée pour mettre le feu…

- Qu… Qu’est-ce que tu fais, Caïn ?

- Moi ? Rien… Je discute avec mon petit frère… Je te présente le véritable meurtrier…

Zack apparut alors hors de l’ombre, canine apparente, un sourire aux lèvres.

- Tu as faim, Zack, n’est-ce pas ?

Il hocha la tête.

- Il n’a pas mangé depuis hier… Et puis… C’est son frère que tu as tué, je doute qu’il laisse grand-chose…

Après avoir chuchoté ces mots à l’oreille de Linda, Caïn posa alors ses mains dans le dos de celle-ci…

- Pour Abel, l’innocent qui a dû payer pour le pêché d’un autre…

… et la poussa vers Zack qui, ni une ni deux, se jeta sur elle et la tua en moins de temps qu’il n’en faut pour le dire. Il n’en laissa pas énormément.

- Bon… Maintenant, va te laver au point d’eau le plus proche, je me débarrasse du corps avec ce que j’ai ramené. Après, il faut que je te montre quelque chose, compris ?

Peut-être serez-vous surpris, mais Zack approuva et obéit à Caïn, pour cette fois. En vérité, Caïn resta un instant devant la dépouille de Linda, sans aucune expression sur le visage.

- Tu avais tort Abel… Amissia ne mérite pas qu’on se batte pour elle… Mais Zack a le droit de vivre dans un monde meilleur… Je vais m’occuper de lui comme j’aurais dû m’occuper de toi. Tu peux reposer en paix…

Il se mit ensuite à rire :

- Et autre chose… Je suis un p***** de meurtrier…

Il prit ensuite le cadavre de Linda et l’amena dans une cabane dans une clairière perdue dans la forêt. C’était la cabane où se trouvait une partie des produits dont se servaient les Sen pour masquer les « accidents » de Zack… Et donc une salle à fort potentiel explosif. Il laissa Linda à l’intérieur, puis pris un bidon d’essence, arrosant la pièce et laissant une traînée de liquide inflammable derrière lui pour pouvoir l’allumer à distance. Au passage, il prit également le briquet et les cigarettes qui se trouvaient dans une petite sacoche, dans la pièce, et qui appartenaient au père d’Abel. Une fois assez loin, il alluma le briquet, et fit exploser la cabane, un sourire aux lèvres, admirant les flammes qui consumaient à la fois la cabane, mais aussi une partie de la forêt.

You'll not rest
Settle for less
Until you guzzle
And squander what's left
Do not deny
That you live and let die

Destroy this City of Delusion
Break these walls down
I will avenge
Justify my reasons
With your blood

[Song: City of Delusion – Artist: Muse]

Avec la quantité d’explosifs contenus dans la cabane, le corps serait littéralement désintégré, on ne la retrouverait jamais, et la cabane étant détruite et visiblement construite à la main, personne ne ferait jamais le lien entre la famille Sen et ce « regrettable incident ». Zack rejoignit Caïn à ce moment-là.

- Viens, je dois te montrer quelque chose maintenant. Il n’y a pas de raison qui justifie qu’on te tienne éloigné de ça.

Zack le suivit bien gentiment (ce qui veut dire calmement, sans manger qui que ce soit en chemin). Caïn l’emmena sur la tombe de son frère. Zack regarda la pierre, ainsi que toutes celles qui l’environnaient.

- C’est ça qu’on appelle un cimetière ?

- Oui, Zack.

- Pourquoi tu m’as amené là ?

- Il n’y a pas de raison pour que tu n’aies pas le droit de te recueillir sur la tombe de ton frère.

Zack resta silencieux, fixant la tombe. C’était la première fois que Caïn le voyait dans cet état. Il avait l’air d’être vraiment affecté par le fait de se retrouver devant la tombe de son frère. Ce n’était pas la première fois qu’il se retrouvait pourtant devant un membre de sa famille mort, les deux précédents ayant même été rayé de la carte par ses soins.

- Ils l’ont vraiment mis la dessous ?

- Oui…

A ce moment-là, Zack se jeta sur la tombe et tenta de briser la pierre. Mais ce n’était pas pour essayer de le déterrer pour le manger, cela se voyait dans ses yeux. Non, il voulait le récupérer. Il voulait son frère. Caïn ne fit rien pour l’en empêcher, et quand celui-ci se calma, il se retourna vers Caïn.

- Tu étais là ?

- C’est moi qui ai joué à son enterrement.

- C’est bien…

Ils restèrent là encore un petit moment, avant que Zack demande à nouveau :

- Dis, Caïn… Tu n’as jamais eu peur de mourir ?

- « L'Éternel lui dit: Si quelqu'un tuait Caïn, Caïn serait vengé sept fois. Et l'Éternel mit un signe sur Caïn pour que quiconque le trouverait ne le tuât point. »

- Quoi ?

- C’est dans la Bible. Livre de la Genèse, chapitre 4, verset 15. Dieu condamna Caïn à l’errance éternelle pour avoir tué son frère. Il devait vivre toute sa vie avec son meurtre sur la conscience. Personne ne devait le tuer, lui. Il était comme immunisé contre le meurtre sur sa personne. Enfin, si on prend les Ecritures au premier degré.

- Mais… T’as pas peur que moi, un jour, je dégénère ?

- Non.

Zack, sans prévenir, lui mordit la main, assez fort pour le blesser légèrement.

- Tu devrais pourtant…

Caïn rit.

- En tout cas, j’ai promis à ton frère que je m’occuperais de toi, et c’est précisément ce que je vais faire. Allez, viens, on rentre.

Les jours qui suivirent, Caïn dut se rendre à l’évidence : Ils n’allaient pas pouvoir survivre sans rien faire. Le problème, c’est que Caïn ne savait rien faire d’autre que de la musique… Jouer de l’orgue, du piano et un peu de guitare. Sinon, il n’avait rien. Il se mit également à fumer, ce qui n’arrangeait pas le budget. Il fallait définitivement faire rentrer de l’argent. Il bossa sa guitare jour et nuit, lisant le soir des livres sur l’acoustique et l’influence des sons sur le corps humain et la psyché humaine. Il faisait des sous en se produisant de temps à autre et en recevant une petite partie de l’argent de la quête dominicale lorsqu’il jouait de l’orgue à l’église. Ce n’était pas bien lucratif, mais cela permit de survivre encore quelques mois.

Pendant ce temps, la criminalité continuait de monter, et comme Abel l’avait prédit, il fut bientôt impossible de sortir de l’île. La mer s’agitait de plus en plus, mais Caïn allait encore parfois nager, pour se maintenir en forme, ce qui lui donna une légère musculature sur son corps d’endive.

C’est après un an et demi de dur labeur qu’il put trouver son utilité. Finalement, la criminalité montante allait être un avantage pour lui. A force d’étudier les ondes acoustiques et la musique, il fallut qu’il teste quelque chose. Il économisa son maigre salaire pendant quelques mois (pendant lesquels Zack était devenu invivable, puisqu’il avait un accès restreint à la nourriture qui commençait à manquer), et s’acheta un ordinateur. Il plancha ensuite sur la création de son propre logiciel (je rappelle à l’occasion que Caïn est un surdoué) afin de faire lui-même ses propre piste. Ce fut en réalité par hasard qu’il se rendit compte du réel impact de « sa » musique.

Son logiciel fut achevé et il tenta une expérience : calmer Zack avec de la musique. L’objectif était donc de donner l’effet des calmants à une piste audio. Caïn essaya tout ce qui était possible et imaginable, mais sans effet, tout se soldant par des échecs. Il énervait Plus Zack qu’autre chose, ce qui multiplia ses rendez-vous chez le médecin… Et puis un jour…

Here's a lullaby to close your eyes.
[Goodbye]
It was always you that I despised.
I don't feel enough for you to cry,
[oh well]
Here's a lullaby to close your eyes,
[Goodbye],
[Goodbye],
[Goodbye],
[Goodbye].

[Song: Room of Angel – Silent Hill IV]

En combinant une chanson triste, tout à fait audible, à un enchaînement totalement inaudible d’ultrasons et d’infrasons, Caïn obtint sa première expérience concluante. Cela avait pour effet de presque anesthésier Zack, à un point assez extrême. Sur un être humain normal, cette musique aurait pour effet d’endormir quiconque l’entend. En réalité, Caïn, par cet enchaînement d’ultrasons et d’infrasons, avait pour but de pousser la conscience jusqu’au point de non-retour, le point où celle-ci lâcherait. Il continua à créer ses expériences, mais aucune d’entre elle ne rapportait de sous à la maison… pas plus qu’elle ne le soulageait de ce vide qu’il avait au fond du cœur…

Abel n’était plus là depuis des mois maintenant… Et pourtant, impossible de l’oublier. Il avait bien essayé (contre l’avis de son médecin) de compenser avec la clope, mais rien n’y faisait… Il se replongea alors un moment dans ses livres de physique et de biologie, pour comprendre le lien entre la musique, l’effet placebo, et les drogues. Vous connaissez tous les E-drugs, n’est-ce pas ? Ces pistes audio qui ont fait fureur pendant un temps car extrêmement chère et destinée à recréer l’effet de certaines drogues. Caïn trouva l’ultime drogue : Un morceau de musique inaudible pour qui n’avait pas l’oreille initiée aux bizarreries de cet art qui, combiné à la prise de nicotine, plongeait dans des états qui n’étaient pas des états seconds, mais des états pires, des « états tiers » ! Il pouvait alors toujours être avec Abel, oublier ses soucis. Mais bon, jusqu’ici, rien de bien utile puisque réservé à un usage personnel. La vraie nouveauté arriva par la suite.

Caïn avait à présent 17 ans, Zack venait d’en avoir 13. Caïn avait à peu près l’âge qu’avait Abel quand il est mort. Il ressentit alors un besoin réel de se protéger. Il lui fallait un système de protection imparable. Chose impossible bien évidemment, car en se servant de sa musique, il aurait tout de même besoin de courant pour alimenter les machines. Il s’occupait alors d’abord de l’éventualité « quelqu’un coupe l’électricité ». Il ne fallait pas non plus que tout soit perdu ou que Zack soit mis en danger. Hors de question de mettre en place un système d’autodestruction de la pièce en cas de coupure de courant. Le fait est qu’il vivait à la cave, que tout le matériel se trouvait à la cave et que la cave n’avait qu’une petite fenêtre. Pourtant, il trouva quoi faire. Un système de verrouillage automatique en cas de coupure de courant. En gros, au lieu de fermer les portes, le courant les maintenait ouvertes. Aussitôt que le courant était coupé dans une pièce, les portes se verrouillaient automatiquement. Vous me direz, les portes, ça se scie. Mais il installa également une cage. En gros, il y avait des barreaux partout dans une bonne moitié de la pièce, dont la porte était équipée du même système. Vous me direz : les barreaux, ça se scie aussi. Risquez-vous à les découper et vous goûterez à l’acide. L’acide ne rongeait pas le métal, mais était hautement corrosif pour la peau. Touchez une goutte de cet acide, et votre peau brûlerait et vous ferait souffrir énormément. Combinez cela à un poison mortel, et vous mourrez dans les cinq minutes qui suivent l’attentat sur les barreaux. Cela est bien suffisant, me direz-vous alors. Je vous rappelle à l’occasion qu’il s’agit de la protection au cas où quelqu’un pense à couper le courant. La première protection allait arriver plus tard.

Avec l’installation de tout cela, Caïn vit sa majorité arriver à grand pas… comme ses plus dangereuses expériences. Il était devenu assez rapide pour mettre une mélodie au point, ayant compris comment fonctionnait la musique sur certaines choses. Ainsi, il mit au point « Bone’s Breaking », une musique qui brise les os. Il en fit plusieurs variations, gardant la plus virulente pour lui, « Bone’s Breaking : Annihilation » une version du morceau qui brisait tous les os sauf le crane en l’espace de 2 minutes. Le plus faible ne brise que les phalanges. Il se les brisa plusieurs fois, ainsi qu’un bras dans le processus. Mais elle fut prête.

Il commença alors à commercer avec les plus offrants. Après démonstration, ceux-ci achetaient ses musiques pour des prix exorbitants, qu’il réinvestit dans du matériel pour pouvoir varier. D’autres musiques suivirent, et c’est ainsi qu’il devint le commerçant que l’on connait. Pour lui, aucun « camp » ne valait mieux qu’un autre. Les forces de l’ordre ne sont que des criminels déguisés avec un beau prétexte. Les criminels n’étaient pas à plaindre, mais il aurait été assez hypocrite de prétendre combattre le crime quand on héberge un serial-killer de 13 ans. Et l’entre-deux… Pour lui, il s’agissait d’une absurdité, puisque bon but, mais mauvaise méthode. Alors pourquoi privilégier un camp plutôt qu’un autre ? Et puis… A ses yeux, il était déjà un monstre, alors autant l’être jusqu’au bout…

Je cache mon cœur
Sous ma carapace
J'ai bien trop peur
Qu'il ne se lasse
Qu'il ne se casse
Je cache ma peine
Sur ces mélodies
Sur ces quelques notes
Qui sauvent ma vie

Je cache mes espoirs
Je les dissimule
J'ai bien trop peur
Qu'ils ne s'envolent

[Song : Un Monstre à Paris – Artist : -M-]

C’est ainsi que le train de vie des deux garçons put reprendre son cours normal. Caïn avait 18 ans et 5 mois. Pourtant, un autre événement allait les bousculer… La visite surprise à domicile du médecin traitant.

Le médecin de Caïn n’était pas du genre à ne pas s’inquiéter, et puisqu’il connaissait Caïn depuis la naissance, il se sentait concerné. C’est de lui que Caïn connait la plupart des choses sur ses parents. Depuis quelques mois maintenant, la criminalité était devenue très haute, et l’absence de Caïn qui venait habituellement toutes les semaines inquiéta le médecin qui décida de venir vérifier que tout allait bien lui-même. J’irai droit au but en vous disant qu’il découvrit Zack dont la porte du placard n’était pas fermée et que son sort fut décidé au moment où Zack apparut. Quand Caïn arriva, il était trop tard. Il venait de perdre son médecin.

You’ve arrived at Panic Station !

[Song: Panic Station – Artist: MUSE]

- Mais qu’est-ce qui lui a pris aussi de venir faire une visite à domicile ?

Oui, il s’en fichait en apparence, mais la musique avait affecté son cortex cérébral. Il se débarrassa du corps en le broyant une fois que Zack eut fini de le manger. Lorsque Caïn, dans un éclair de lucidité humaniste, tenta de le rouspéter, il déclencha une bagarre avec Zack. Ca n’était pas la seule, mais ces batailles étaient salutaires. Toutefois, Zack essaya de lui mordre dans le cou. Caïn alors le repoussa très violemment.

- Zack, je t’ai déjà dit de PAS ME TOUCHER LA ! Tu me mords où tu veux mais pas LA !

Bref. Il fallait trouver un nouveau médecin. Le problème, c’est qu’avec ses activités, Caïn ne voulait pas risquer d’être découvert, il lui fallait éviter les médecins de l’hôpital. Il lui faudrait probablement trouver un médecin caché.

Il en trouva un dans les sept mois qui suivirent. Il y eut plusieurs accidents avec Zack, mais avec le temps, Caïn avait eu le temps de s’offrir certains privilèges, tels que ceux « d’appréhender le coupable lui-même » lorsqu’il n’avait pas eu le temps de faire disparaître les traces.

Il utilisa à son avantage la situation d’Amissia, devenant alors un mercenaire musical, recevant des commandes des quatre coins de l’île, sans être regardant sur ce à quoi sa musique allait servir ou à qui il la vendait.

Il eut le temps de s’acheter neuf autres guitares, et ne joue jamais sur Abel lorsqu’il fait une musique offensive (d’ailleurs, c’est la chose la plus protégée de toute la maison). Dans l’ordre d’obtention, voici les noms : Heather (électrique, brune), Cathy (sèche, bois clair), Jolly (folk, rouge bordeaux), Deep (basse, couleur onyx), Hybrid (basse à six cordes, bleu électrique), Double (folk à 12 cordes, crème), Red Purple (électrique, il joue le plus souvent sur elle dehors, couleur rouge), Milly (électro-acoustique, bois très clair), Allessa (Electro-acoustique, bois très foncé, il joue énormément dessus aussi).

Zack restait égal à lui-même, aimant et détestant Caïn, commettant de temps à autre un meurtre.

Z is for Zack who simply went… INSANE !

[Song : A Gorey Demise – Artist : Creature Feature]

Voilà, c’est ainsi que Caïn devint ce que nous voyons aujourd’hui : Un fou de musique gardant un serial-killer et supprimant les témoins. Ceci dit, une fois que Zack eut fini de muer, quelques mois après ses 16 ans, Caïn décida de l’initier à la musique, et Zack ne rouspéta pas. Au contraire, il était étrangement calme et civilisé dans ces moments privilégiés avec son frère…

Actuellement, Caïn enrichit sa collection d’instrument. En effet, il compte faire l’acquisition d’une batterie et cherche des pièces pour se fabriquer son propre thérémine…